Dans une entreprise adaptée, les aménagements, simples mais essentiels, permettent à chacun·e de s’adapter et de conserver son emploi. Comment s’inspirer de ce modèle pour trouver d’autres façons de faire dans le monde du travail et de la formation ?
Point de vue d’expert·e
Nous laissons la parole à Lucas Pelletan de l’entreprise adaptée de NovaSancO pour nous aider à comprendre le concept d’entreprise adaptée et voir comment on peut faciliter l’insertion professionnelle des Personnes en Situation de Handicap (PSH) au quotidien.
Le Handicap, une réalité collective que l’on connaît mal ?
Quand on évoque le mot handicap, on a tous et toutes des images qui nous viennent en tête : un fauteuil roulant, une canne blanche qui guide, une rampe devant un bâtiment. Normal : c’est ce que l’on voit en premier, les handicaps moteurs. Mais ça, c’est juste la partie visible de l’iceberg. Il y a également tous les handicaps qui ne se voient pas : les handicaps psychiques, mentaux, cognitifs, sensoriels, visuels, auditifs…
La réalité c’est qu’en France, en 2024, le nombre d’enfants et adultes en situation de handicap variait de 5.7 à 18.2 millions selon la définition utilisée.
Effectivement, quand on prend un café avec un·e collègue, quand on bosse avec des équipes sur un projet, ça veut dire qu’il y a de grandes chances qu’une personne autour de la table vive avec un handicap. Et comment on peut les accompagner ? Comment peut-on les mettre à l’aise pour pas que ces dernier·ères aient peur d’être jugé·es ou mis·es de côté ?
La loi de 2005 pour l’Égalité des Droits et des Chances, définissant le handicap posait le principe que c’est à la société de s’adapter aux personnes en situation de handicap et non l’inverse. 20 ans après, le constat est que, oui des initiatives existent mais qu’il reste beaucoup de choses à faire, et notamment dans le monde du travail, car il y a encore un énorme fossé. Il faut changer le regard dans ce cadre là. Et c’est notamment pour ça que le concept des entreprises adaptées a été créé.
Une entreprise adaptée, Ké sa ko ?
Pour de nombreuses entreprises, recruter une personne en situation de handicap est un défi : quel poste de travail ? quel aménagement ? etc. Cela se résume encore à une contrainte légale : atteindre le taux de 6%. Mais derrière ce chiffre, il y a des personnes, des parcours, des besoins d’adaptation et c’est là où les entreprises adaptées interviennent.
L’entreprise adaptée c’est une entreprise comme les autres, une entreprise ordinaire soumise aux dispositions du Code du Travail mais à la seule différence qu’il y ait obligatoirement et au minimum 55% de ses salarié·es en situation de handicap. L’objectif de ce modèle d’entreprise est de rendre accessible l’emploi à tous et à toutes mais en particulier aux personnes en situations de handicap, et de leur permettre de conserver cet emploi.
NovaSancO en est une, un exemple d’entreprise qui combine activité économique et mission sociale. Ce type d’entreprises peuvent bénéficier d’aides financières de l’Etat pour favoriser l’adaptation et l’insertion de ses salarié·es. Et justement comment réussir leur adaptation ?
Comment réussir l’adaptation des PSH ?
Tout simplement : en discutant. La communication, la base de l’adaptation. En prenant le temps d’écouter et d’échanger avec la personne concernée sur son besoin d’adaptation, on se rend compte que des petits ajustements suffisent : une pause supplémentaire, une organisation différente, un poste mieux adapté. Rien d’insurmontable. Mais tant qu’on ne le sait pas, on n’ose pas même pour des situations de handicaps complexes.
Et concrètement, cela se traduit par des aménagements adaptés aux besoins de chacun·e et qui profitent à tou·tes les salarié.es en situation de handicap ou non : postes équipés de bureaux réglables en hauteur, sièges ergonomiques, doubles écrans pour réduire la fatigue visuelle, possibilité de télétravail si nécessaire. L’organisation du temps de travail peut être repensée pour préserver l’équilibre : arrivée possible jusqu’à 9h30 le matin, pas de vendredi après-midi, et un vendredi offert chaque mois, par exemple. Ces ajustements, simples en apparence, changent beaucoup de choses dans la vie quotidienne des personnes en situation de handicap. Ce concept d’entreprise adaptée renforce également la culture d’entraide et de cohésion.
Sensibiliser au handicap, la création d’une Fresque
NovaSancO est allé plus loin que le modèle d’entreprise adaptée pour sensibiliser au handicap en créant notamment la Fresque du Handicap. S’inspirant de la logique de la fresque du climat, c’est une véritable formation interactive qui permet de monter en compétences sur les enjeux du handicap. Elle a été créée par des personnes en situation de handicap. Son objectif est “Apprendre et agir ensemble pour adapter l’environnement aux situations de handicap”.
A travers un atelier collaboratif, l’idée est de discuter, de comprendre ce qu’est le handicap, de déconstruire les clichés, d’identifier les compensations possibles pour repartir avec une vision plus claire et des clés concrètes pour agir contre le handicap.
Cette Fresque du Handicap, elle permet d’aller plus loin, parce que l’on a encore du mal à parler du handicap, souvent par peur, peur de mal dire, peur d’être maladroit·e, peur de ne pas savoir. Alors, on va éviter. Néanmoins, en basant sur l’échange, la discussion, on peut proposer des adaptations et des ajustements qui suffisent. Tant que l’on n’en parle pas, on n’ose pas, alors qu’en fait, un rien peut faire beaucoup de choses. Et ça a été toute la logique de NovaSancO.
L’inclusion, plus qu’une case à cocher
Mon message à travers tout ça, c’est de montrer que l’inclusion n’est pas simplement une case à cocher ni une journée symbolique dans l’année. C’est l’idée d’avoir une culture d’intégration des personnes en situation de handicap. Et ça passe par former, sensibiliser, accepter d’aborder le sujet, parfois même sans avoir toutes les réponses, mettre en place des aménagements simples mais efficaces, travailler avec des partenaires qui connaissent le terrain. Et pour ça, on a l’AGEFIPH pour l’accompagnement, les financements, Cap Emploi pour le recrutement. En Nouvelle-Aquitaine où est basé NovaSancO, on a aussi le CRFH, le Centre Ressources Formation Handicap, regroupant un annuaire d’Organismes de Formations engagés dans l’accueil de personnes en situation de handicap.
Le handicap, ce n’est pas une exception. C’est une réalité vécue par des millions de personnes. Mais c’est aussi une opportunité : repenser le travail, renforcer la solidarité, créer des équipes plus fortes. Et c’est là que le monde du travail joue un rôle énorme. Parce que le travail, ce n’est pas juste une fiche de paie à la fin du mois. C’est aussi du lien social, de la coopération, des échanges. Si on change le regard dans ce cadre-là, la société entière peut bouger et enfin s’adapter aux personnes en situation de handicap.
Article rédigé par Lucas PELLETAN – Chargé de communication – Groupe NovaSancO
Chargé de communication pour le Groupe NovaSanCo, un groupe basé en Nouvelle Aquitaine mais avant tout une entreprise adaptée. Il gère les réseaux sociaux, la rédaction et le référencement. Lui-même en situation de handicap, il sait ce que cela implique au quotidien : fatigue, adaptation, persévérance. Il sait aussi combien cela lui a appris à être créatif, à trouver d’autres façons de faire. I
Article publié le 30/10/2025
Relu et corrigé par Charlotte Guillot – Ingénieure pédagogique et Diana Portela – Consultante pédagogique | Conceptrice digital learning | Formatrice.
Témoignages
Ed For Good est allé à la rencontre des membres de son réseau pour discuter du handicap et de l’accessibilité.
Hélène Capel, bibliothécaire assistante spécialisée et autiste de 31 ans
Hélène nous raconte son récit poignant et brut, de son parcours personnel, scolaire et professionnel depuis son non diagnostic durant l’enfance, les incidences sur sa scolarité (audio n°1) ainsi que son diagnostic en fin d’adolescence, son quotidien et ses projets professionnels (audio n°2).
Ce qu’on retient du vocal :
- Les stéréotypes et les moqueries sur les autistes ont encore la vie dure.
- Les sollicitations externes (bruits, foule) impactent la charge cognitive.
- Il est nécessaire d’accompagner lors du diagnostic et cela à tout âge.
Aller plus loin
Est-ce que je peux réutiliser cet article ?
Attribution – Pas d’Utilisation Commerciale – Partage dans les Mêmes Conditions
Cela signifie, que tu es autorisé·e à partager ce article par tous les moyens et sous tout formats, à condition de créditer Ed For Good et l’auteur·rice, indiquer si des modifications ont été effectuées en intégrant un lien vers la licence (sans toutefois suggérer qu’Ed For Good, l’auteur·rice ou les interviewé·e·s te soutiennent), et ne pas en faire un usage commercial.